Attention, un flic peut scratcher un vélo
Peur de se retrouver bientôt à deux roues ?
"Nous vivons à une époque où le superflu est notre nécessité" O. Wilde
Alex Gaudin est Planneur Stratégique dans une agence de publicité. Après des études de sociologie sur les Sounds System Techno, part travailler en Afrique du Sud pendant un an, avant de revenir s'investir en France dans le domaine culturel, à travers l'organisation de concerts pour des artistes de jazz. Travaille également pendant dix ans au sein du Montreux Jazz Festival.
IS ANOTHER PLANNING POSSIBLE?
Je suis assez surpris de voir que la discours langue de bois ("La crédibilité d’une marque reposera de plus en plus, non pas sur ce qu’elle dit mais sur ce qu’elle fait." [Alex]) et les clichés ("[...] il me semble que le planning sert davantage a legitimer le sempiternel choix du spot de 30' et ou la creation occupe la place phare..." [Lamia]) continuent de gangréner le monde des agences.
Accordons-nous sur ce point : la communication est d'abord faite pour dire. Si les gens ont besoin de preuves de ce que la marque a fait, c'est sur le "terrain" (magasin, ecommerce, conseil, etc.) que cela se passe. Et le "dire" n'a de valeur que lorsqu'il arrive consécutivement à un "faire" avéré, inscrit dans les pratiques des conseillers/vendeurs, du personnel, de la marque. Pas avant, pas autrement.
Complètement d’accord. Il n’empêche que la communication a un rôle à jouer pour rendre audible – et donc dire - ce que font les marques. Ou pour prendre le problème autrement, peut être que l’avenir de la communication passe de moins en moins par la pub, mais par une réflexion sur le produit, son design, sa mise en vente, etc. Mais est-ce encore de la com ? Ou l'avenir du planning est-il ailleurs que dans la com ?
Ensuite, l'idée selon laquelle le planning sert à légitimer une création omnipotente est complètement fausse. Et c'est bien ça le problème : ELLE NE LE FAIT ABSOLUMENT PAS. Je m'explique.
En vrai, qu'est-ce que le planning ? Un domaine d'expertise où se rencontre une multitude de personnes atteintes du simplexe de supériorité (i.e. l'inverse du complexe d'infériorité). Quand chacun se croit meilleur que l'Autre et qu'il s'agit de collaborer, cela donne une espèce de combat qui ne dit pas son nom, dans lequel personne ne prend aucune décision car chacun reste persuadé que c'est son point de vue qui mérite de l'emporter.
Le planneur serait donc atteint du syndrome du simplexe de supériorité ! Au-delà de cette jolie formulation, que doit-on y comprendre ? L’Autre, ici, est-il partie prenante de l’agence, ou au contraire se situe-t-il chez l’annonceur, et quelque soit son niveau ? Dans le second cas, la question ne devient-elle pas plutôt : le planneur, et ce qu’il peut apporter comme champ de compétences, n’arrive-t-il pas trop tard dans le processus, dans une posture quelque peu cosmétique de communication ? Le planneur pourrait-il apporter des bénéfices tangibles à un annonceur dès la conception de ses produits, de ses stratégies de commercialisation ?Mais est-ce alors un métier qui se fait toujours en agence ?
Le planning est injustifiable. Cela aussi est vrai. Pourquoi ? Tout simplement parce que la plupart du temps, sinon tout le temps, son mode de fonctionnement est tout sauf scientifique. Il ne repose sur aucune méthodologie. Les quelques outils dont vous entendrez parler sont, au mieux, des espèces de cautions fallacieuses envoyées au Client pour lui fournir des signes d'apaisement dans un monde constamment sous pression - pour le pire jusqu'à maintenant (mais la faute à qui ?). Quand je parle de scientificité, je ne pense pas à un laboratoire dans lequel des blouses blanches s'agiteraient autour d'un consommateur-éprouvette. Je veux simplement dire qu'il manque au planning la rigeur et la réflexivité qui permettraient, en s'en donnant et le temps et les moyens, de fournir tout un faisceau de preuves utiles non pas pour décider dans le sens de ce que les preuves semblent indiquer (les preuves sont falsifiables), mais pour réfléchir correctement.
J’ai un avis partagé sur ce point. Assez d’accord pour dire que bien souvent, les méthodo mises en avant, au même titre d’ailleurs que les « philosophies d’agences », jouent bien souvent le rôle de caution de sérieux, de cache-misère méthodologique. Mais ne s’agit-il pas de la réponse de la bergère au berger, face à des annonceurs qui ne sont parfois pas les derniers à promouvoir un sabire jargonnant et abscons. On évolue bien souvent dans une surenchère verbeuse, où le mot ronflant dissimule le creux de la pensée. A l’inverse, je trouve aussi stimulant, que le planning au sens large, apporte de par la diversité de représentants et de leurs formations et compétences, des façons de voir qui permettent parfois de développer des regards neufs sur des enjeux marketing ou commerciaux.
Prendre quelques mesures allant dans ce sens autoriserait donc à ne plus chercher/trouver des insgihts en fonction d'une expérience toute personnelle (celle d'un planneur, d'un dg, d'un président - difficulté : lequel a plus raison que l'Autre dans ce cas ?), à prendre des décisions courageuses plutôt que de tourner en rond pour reformuler de manière différente et toujours moins subtile contrairement à ce que cela laisse comme impression, et parvenir ainsi à être encore plus brouillon que lors du premier jet (véridique, et, enfin, à en finir avec les approximations affligeantes qui rendent les positions de certains inattaquables parce que tout simplement injustifiées.
Si la connaissance des consommateurs est indispensable, en revanche elle ne fait pas tout. Le risque pour une marque c'est de sombrer dans la moyennisation de son discours, de perdre les aspérités qui la rendent vraiment intéressante à "écouter" et à "comprendre".
Malgré tout ce que la subjectivité des propos des stratèges peut laisser imaginer, c'est justement vers cet afadissement que beaucoup de marques se dirigent, notamment en France (le dernier palmarès cannois ne dit pas le contraire).
Et pourtant, dans cette dictature de l’eau tiède, il existe quelques contrexemples qui montrent que le courage paye parfois. Est-ce le fait de chercher à comprendre le consommateur – notion floue s’il en est – qui conduit à ce nivellement des communications, ou est-ce au contraire la volonté trop souvent affichée d’annonceurs, de vouloir plaire à tous, et partant de là, à personne ?
Comme quoi, subjectivité absolue, carence de scientificité et ethnocentrisme ne produisent pas un résultat hautement créatif.
Re d’accord, comme le dit je ne sais plus qui: « Face it : most members of marketing departments are not living the same lives as their target audiences ».
Plutôt que de brider le processus créatif, le planning devrait avant tout servir à mieux auditer la marque pour définir le périmètre dans lequel les créatifs pourraient intervenir. Ce n'est seulement qu'après, au vu des des pistes créatives soumises, que le planning interviendrait pour offrir différentes interprétations de ces pistes et les estimer en fonction de leur degré de compatbilité avec la marque et son intention. A ce moment, différents scénarii pourraient être proposés avec, à chaque fois, une tentative de projection à court, moyen et long terme.
Il s’agit d’intéressantes perspectives pour le planning. Mais comment mettre en pratique cet audit de marque de façon suffisamment réactive ? Sous forme de mission chez l’annonceur ? Et quels risques de collusion avec le juteux secteur des audits ? Existe-t-il aujourd’hui des structures de planning qui jouent ce rôle chez les annonceurs ? En quoi le planning chez l’annonceur est-il proche ou éloigné du planning en agence ?
Un planning interprétatif, de scénario (et non pas de storytelling comme la pensée unique actuelle tend à le faire croire), voilà qui donnerait un nouveau souffle au planning franco-français, qui ne devrait pas non plus avoir à ressembler à son cousin anglo-saxon (eugnénisme publicitaire ?). Au moins le planning servirait à outiller le désamorçage du risque perçu par le Client de façon un peu plus objective (et donc efficace ?). Et quitte à devoir débattre longuement, autant que cela se fasse sur une base que tout le monde peut s'approprier sans se sentir obligé d'en remontrer à l'Autre.
Un planning qui servirait à outiller le désamorçage du risque perçu par le Client. Je trouve qu’il existe des perspectives très riches derrière cette remarque. De quels risques parle-t-on. Des risques économiques liés à une activité ? Des risques liés à une évolution de stratégie de communication ou de territoire de marque ? Des risques liés à l’ouverture de l’entreprise à des compétences traditionnellement absentes ? Ou encore des risques liés à l’immobilisme dans un champ de consommation et de conscience sociale en profond bouleversement ?
Au plaisir d’en débattre plus avant, un jour !
I HAVE A DREAM THAT ONE DAY...
Musique !
"Generally, we don't believe that incarceration should be part of a business model for profit. This is a public good, it's an effort to rehabilitate, it's an effort to provide public safety and it should be governed by those principles rather than principles of profit," Ryan King, The Sentencing Project
Un vaste réservoir de main d’œuvre, bon marché (l’heure travaillée varie de 17c à 2$) qui intéresse de nombreuses industries : des entreprises comme IBM, Motorola, HP ; Dell, Intel etc ont conclu des contrats pour faire travailler des prisonniers dans les prisons d’au moins 37 Etats des USA.
Alors allons en France.
Dans le cadre des PPP (contrats de partenariats public privé), le groupe Bouygues vient de se voir confier sur appel d’offre la construction de trois établissements pénitentiaires.
Pourquoi pas, c’est le métier de Bouygues – en espérant que leurs prisons soient de meilleure qualité que les fondations réalisées pour l’EPR et dont les travaux ont dû être suspendus faute de conformité…
Ce qui est plus intéressant, c’est que le groupe Bouygues, via sa filiale Nortac, se voit confier et dixit Le Monde, une concession de 27 ans pour « assurer la maintenance et le nettoyage des locaux mais aussi les services aux personnes, blanchisserie, restauration, soins et transport des détenus, ainsi que l'accueil des familles et même la gestion du travail des prisonniers et leur formation professionnelle » et le tout contre un loyer annuel de 48 millions €.
Alors si Bouygues s’y colle, ce ne sont pas les beaux yeux des détenus qui font le mobile, c’est apriori qu’il peut s’agir d’un bon business. Et en ce moment, un bon business, c’est toujours mieux pour les potes (cf. le traitement de choc de l’audiovisuel public)....
A quand le mobile Bouygues fabriqué par des détenus ?
JaKlab, c’est chaque trimestre un tour d’horizon thématique qui confronte différents regards et compétences autour d’un sujet donné.
Lancé par Just a Kiss, agence de stratégie, le JAKlab est donc un support participatif, ouvert aux langues qui n’ont pas leur plume dans la poche.
Après le développement désirable et l’Absolu nécessité, voici venu le temps de l’Urbanité.
77 pages à lire en diagonale ou à l’horizontale, des textes et des collages, des photos et de l’illustration, pour le plaisir des yeux et de la réflexion.