L'Oeil du Xeul

"Nous vivons à une époque où le superflu est notre nécessité" O. Wilde

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Lieu : Paris, France

Alex Gaudin est Planneur Stratégique dans une agence de publicité. Après des études de sociologie sur les Sounds System Techno, part travailler en Afrique du Sud pendant un an, avant de revenir s'investir en France dans le domaine culturel, à travers l'organisation de concerts pour des artistes de jazz. Travaille également pendant dix ans au sein du Montreux Jazz Festival.

02 décembre 2008

Passe le splif !















Décidément! Après les mésaventures de l'ancien directeur de la rédaction de Libé, voici venu les récits sur l'approche pleine de pédagogie mise en œuvre par les fins limiers du Gers pour lutter contre le dramatique danger du pétard à l'école. Ci-dessous le témoignage d'une élève de 13 ans à Marciac, quelque peu déstabilisée par les méthodes des pandorres.

J’ai eu cette semaine un mail concernant une descente de police dans un lycée du Gers… On a pu entendre aussi le témoignage sur France inter. J’étais absolument abasourdi par les méthodes utilisées… Mais vous savez parfois on se dit que les gens exagèrent dans leur témoignage…. Bref, je reste interrogateur !

Mais voilà que ce WE, j’accueille ma fille Zoé -elle a 13 ans- de retour du collège de Marciac. Elle me raconte son mercredi au collège… colère à l’intérieur de moi… révolte… que faire???
J’ai demandé à Zoé d’écrire ce qu’elle me disait là. Elle a accepté.
Voici donc son témoignage, avec ses mots à elle :

« Il nous l’avait dit, le CPE, que des gendarmes allaient venir nous faire une prévention pour les 4ème et les 3ème.
Ce mercredi là (19/11/2008), toutes les classes sont entrées en cours comme à leur habitude, en suivant les profs.
A peine 10 minutes plus tard - nous étions assis-, deux gendarmes faisaient déjà le tour de la salle où nous étions. La prof avec qui nous étions, les regardait en nous disant « Ils font leur ronde!?? » . Elle n’était à priori au courant de rien bien sûr. Soudain , la porte s’est ouverte, laissant entrer deux gendarmes… Enfin non, pas exactement!!! Il y avait un monsieur chauve habillé en militaire ( le dresseur de chien en fait!) et un gendarme très gros.

Le chauve nous a dit: « Nous allons faire entrer un chien! Mettez vos mains sur les tables, restez droit, ne le regardez pas! Quand il mord, ça pique! »
Enfin il a dit ça, à peu près… Je me rappelle surtout du « Quand il mord, ça pique! »

Après, il est sorti deux minutes et est revenu avec deux autres gendarmes et le chien. Les gendarmes se sont placés aux deux extrémités de la classe tandis que le dresseur regardait son chien déjà à l’œuvre. Le chien s’appelait Bigo. Bigo s’est acharné sur plusieurs sacs, en mordant et arrachant tout ce qui dépassait. Quand à la prof, elle restait derrière son bureau bouche bée.
Le chien s’est attaqué au sac de mon amie, à coté de moi. Le dresseur a claqué des doigts en disant: « Sortez mademoiselle, avec toutes vos affaires! » Elle a rangé son sac, s’est levée et s’est apprêtée à sortir mais le dresseur l’a repris vite: « Et ton manteau! » Elle a rougi et emporté aussi son blouson.

Plusieurs personnes de la classe sont ainsi sorties. Le chien vient alors sentir mon sac. Voyant que le chien ne scotchait pas, que rien ne le retenait là, le dresseur lui a fait sentir mon corps avant de s’empresser de me faire sortir. Dehors m’attendait une petite troupe de gendarmes… Enfin, non, pas dehors: nous étions entre deux salles de classe.
Me voyant arriver, ils se dépêchèrent de finir de fouiller une autre fille. Mon amie était déjà retournée dans la classe. Quand ils eurent fini, ils s’emparèrent de mon sac et le vidèrent sur le sol. Un gendarme me fit vider les poches du devant de mon sac. Il vérifia après moi. Je n’étais pas la seule élève. Avec moi, il y avait une autre fille qui se faisait fouiller les poches par une gendarme.
Ils étaient deux gendarmes hommes à la regarder faire. Le Gendarme qui fouillait mon sac vida ma trousse, dévissa mes stylos, mes surligneurs et cherchait dans mes doublures.
La fille qui était là fouillée elle aussi, se fit interroger sur les personnes qui l’entouraient chez elle. Elle assurait que personne ne fumait dans son entourage. Ils la firent rentrer en classe.

C’était à mon tour! La fouilleuse me fit enlever mon sweat sous le regards des deux autres gendarmes…..
Je décris: Un gendarme à terre disséquait mes stylos, un autre le surveillait, un autre qui regardait la fouilleuse qui me fouillait et le reste de la troupe dehors. Ne trouvant rien dans ma veste, elle me fit enlever mes chaussures et déplier mes ourlets de pantalon. Elle cherche dans mes chaussettes et mes chaussures. Le gars qui nous regardait, dit à l’intention de l’autre gendarme: « On dirait qu’elle n’a pas de hash mais avec sa tête mieux vaut très bien vérifier! On ne sait jamais… » Ils ont souri et la fouilleuse chercha de plus belle! Elle cherche dans les replis de mon pantalon, dans les doublures de mon tee shirt sans bien sûr rien trouver. Elle fouilla alors dans mon soutif et chercha en passant ses mains sur ma culotte! Les gendarmes n’exprimèrent aucune surprise face à ce geste mais ce ne fut pas mon cas!!!!!!

Je dis à l’intention de tous « C’est bon arrêtez, je n’ai rien!!!! »
La fouilleuse s’est arrêtée, j’ai remis mon sweat et mon fouilleur de sac m’a dit: « tu peux ranger! ».

J’ai rebouché mes stylos et remis le tout dans mon sac et suis repartie en classe après avoir donner le nom du village où j’habite.
De retour en classe, la prof m’a demandé ce qu’ils ont fait. Je lui ai répondu qu’ils nous avaient fouillé. Je me suis assise et j’ai eu du mal à me consacrer au math!

Tout ça c’est ce que j’ai vécu mais mon amie dans la classe à coté m’a aussi raconté.
Le chien s’est acharné sur son sac à elle et elle a eu le droit au même traitement. Mais ses affaires sentaient, alors ils l’ont carrément emmené à l’internat où nous dormons. Le chien s’est acharné sur toutes ses affaires m’a t-elle dit. Le gendarme lui a demandé si elle connaissait des fumeurs de hash, vue qu’ils ne trouvaient rien. Elle leur a simplement répondu que le WE dernier elle a assisté à un concert!
Le CPE l’a ramené ensuite au collège et elle m’a raconté.

Après les cours, le principal a rassemblé tous les élèves et nous a dit que bientôt allait avoir lieu une prévention pour tout le monde.

Une prévention? Avec des chiens? Armés comme aujourd’hui?

Une élève de 4ème nous a dit que le chien s’est jeté sur son sac car il y avait à manger dedans. Elle a eu très peur.
Les profs ne nous en ont pas reparlé….Ils avaient l’air aussi surpris que nous!
Tous les élèves de 3ème & 4ème ont du se poser la même question: Que se passe t il?
Et tous les 6ème et 5ème aussi même si ils n’ont pas été directement concernés! »

Zoé.D.R

Mais que fait la police!

4 commentaires:

Blogger Gil R a dit...

Les faits ont-ils un rapport avec la situation politique du pays ? Pas sur... Moi je suis scandalisé pour 2 raisons :

-Le traitement infligé à ces jeunes collégiens est honteux et indigne de notre République, surtout dans un de ses sanctuaires.

-Ce traitement est le quotidien de très nombreux jeunes (des cités ou pas, j'y ai eu droit à plusieurs reprises dans ma jeunesse) et ça n'a jamais fait buzzer le web ainsi...

Next step ?

7:30 PM  
Anonymous Anonyme a dit...

Comment accepter ça dans un environnement soi disant protégé ?
C'est juste scandaleux ... Pourquoi n'y a t il pas plus d'écho dans les "grands" médias de ce genre de comportement ??

9:46 AM  
Anonymous Anonyme a dit...

Bonjour Alex,
Voilà une intervention musclée dont on peut comprendre qu’elle choque. Mais attention, elle ne produira cet effet que sur ceux qui se plaisent à rester lovés dans le confort douillet de leurs idées préconçues et qui refusent d’aller se frotter à une certaine réalité, celle du terrain, piquante voire même urticante.
Oubliez les images d’Épinal d’un collège où chaque élève est mis sur un pied d’égalité. Où l’on s’évertue à gommer le moindre cm² de différence sociale. Oubliez aussi l’image d’élèves bien mis, propres sur eux, respectueux des autres, capables d’intégrer les règles et de les assimiler pour rendre la vie collective harmonieuse.
En 2008, les choses ne sont plus du tout les mêmes. Je suis assistant d’éducation dans un collège depuis septembre. L’établissement dans lequel je travaille, pourtant localisé dans ce que l’équipe de direction a présenté comme une « zone d’éducation privilégiée », présente quelques différences avec le collège idéal et tendrait plutôt à se rapprocher, paradoxalement, mais en certains points seulement, des collèges de zone d’éducation prioritaire.
Il ne m’a pas fallu longtemps pour comprendre que les conditions de l’éducation aujourd’hui ont changé. Imposez à 28 élèves qui se retrouvent en heure de permanence de s’installer chacun à une table dans le silence et « placez » les élèves les plus retors à des endroits stratégiques de la salle pour prévenir tout débordement, et vous aurez l’honneur d’une réputation que vous n’aviez même pas rêvée : celle d’un passage par une institution militaire durant vos années de jeunesse (sûrement là où vous avez appris vos pratiques ségrégationnistes). Demandez à celui qui n'est pas prompt à se mettre au travail (toujours pendant l’heure de permanence) et il vous gratifiera d’un « Putain, je me fais chier » qui n’aura pas même échappé à son camarade le plus concentré et le plus éloigné aussi, à l'autre bout de la salle. Un autre, tout aussi déterminé à rester larvé dans la vacuité, se permettra de renchérir : « Au temps de la révolution, on t’aurait mis au cachot. » Plus tard, le même élève, sous la menace d’un rapport, vous « conseillera », vous l’ « autre » (mais avec une minuscule qui s’entend), d’aller vous faire soigner en allant « voir un psychologue ». Mais l’insulte peut être parfois plus directe, moins altruiste, surtout lorsqu’elle fait suite à des rappels à l’ordre successifs qui se soldent finalement par un mot dans le carnet de liaison : « Enculé. » (là, encore une fois, de sorte que les 50 élèves présents connaissent le fond la pensée de leur camarade à votre sujet).
Provocation de la personne incarnant une forme d’autorité qui n’a absolument plus rien à voir avec la psychorigidité à laquelle assimilent ceux qui pensent que le 21ème est celui de méthodes repensées tout ce qui a trait à l’exercice d’une domination qu’ils estiment illégitime ?
Sadomasochisme manifesté par le couple dialectique attraction/répulsion ? Peut-être. Peut-être pas non plus.
Alors quoi ?
Comme le suggèrent certains auteurs, c’est plutôt un problème qui se situe originellement dans la sphère familiale dont le rôle constructeur n’est plus assumé. La famille est devenue relationnelle, tout s’y négocie. A tel points que dans certains, de moins en moins exceptionnels, on se demande des parents ou de l'enfant commande l'autre. Au quotidien, je vois des parents aux petits soins, qui accourent au moindre souci, comme si toute cette relation parents-enfant reposait sur une connivence ultra défiante à l’égard de l’institution que représente le collège. Les parents ne sont ni neutres, ni du côté de l’école, mais de celui de leur enfant. Et cela se ressent. Essayez d’être ce que les parents ne sont pas toujours, c'est-à-dire un mur contre lequel l’enfant se cogne irrémédiablement pour mieux lui inculquer l’idée que tout ne s’obtient pas d’un claquement de doigts, et ce sont les parents qui vous tombent dessus et judiciarisent au besoin le tout pour bien vous faire comprendre que vous n’avez pas à vous substituer.
Donc au final, chaque jour de la semaine, c’est moins à une cohorte que nous avons affaire qu’à 700 élèves tous différents qui veulent être traités comme tels. Enfin, disons qu’ils ne le formulent pas explicitement, cet impératif de traitement singulier. Ils se comportement plutôt de manière telle que nous autres, assistants d’éducation, n’avons pas d'autre choix que de pratiquer une gestion personnalisée de chaque cas. Et comment expliquer alors, l’égalité devant la sanction ? Comment expliquer à ceux qui respectent les règles que la déviance de certains de leurs camarades n’est pas sanctionnée comme elle le devrait ?
Par ailleurs, l’article rapportant les faits à propos de l’intervention dans le collège du Gers, jouxtait, dans Le Monde, un autre article faisant état de la responsabilité pénale des jeunes qui est désormais fixée à 12 ans. D’après une des personnes interrogées, tout ce que les jeunes auront le droit de faire, c’est d’aller au cinéma. Certes, mais ce que cette personne semble oublier un peu trop facilement, c’est qu’à 13 ou 14 ans, les jeunes dealent, font commerce de substances notoirement nocives, introduisent des pétards dont l’usage de manière inconsidérée peut avoir des conséquences lourdes pour l’intégrité des gens (eg surdité irréversible) qui travaillent à la surveillance et des élèves eux-mêmes. Alors, non, décidément, les jeunes collégiens aujourd’hui ne font pas qu’aller au cinéma comme en 1950. Ou alors peut-être est-ce justement le cinéma qui leur fournit ce catalogue d’idées trop adultes pour des esprits encore en formation qui pousserait les assistants d’éducation à se transformer en agents des stup’, de la BAC, ce qu'ils ne sont pas. Le rôle des assistants d’éducation se lit dans leur dénomination : être un relais des parents dans l’éducation de leurs enfants. C’est donc à un déplacement des lignes de démarcation qu’il faudrait procéder : non plus parents/enfant versus collège, mais parents/équipe éducative-professorale vers l’enfant.

Alors plutôt que « Mais que fait la police ! », il aurait peut-être mieux valu écrire « Mais que font les parents ? ».

12:34 PM  
Blogger LeXeul a dit...

Bonjour Yves,

Plutôt d'accord avec cette analyse. Néanmoins, et une fois posé le juste constat d'une certaine "démission" des parents (encore faudrait-il se pencher sur les multiples facteurs amenant à celle-ci) se pose la question du caractère approprié de l'intervention telle qu'elle semble s'être déroulée.

8:55 PM  

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